La situation de l'Ukraine est aujourd'hui absolument désastreuse à tous égards, et même franchement dangereuse pour l'Europe.


Voir ici le traité de coopération entre la Russie et l'Ukraine de 1997, (en russe).


I - la situation économique

L’économie est en ruine : la production industrielle est en chute libre, du fait que, premièrement, la région minière la plus riche est précisément celle où se déroule la guerre ; deuxièmement, les exportations vers la Russie, qui sont vitales pour le pays, sont également en chute ; troisièmement, la monnaie a perdu les deux tiers de sa valeur ; et quatrièmement, les réserves financières ont fondu comme neige au soleil. Le pays ne se soutient plus que par les prêts européens et américains, sans laquelle il serait déjà en cessation de paiement. À cela il faut ajouter le coût de la guerre, de 4 millions par jour.

Il y a aussi des pertes d'emplois massives (85% d'emplois dans les PME ont disparu). La chute d'exportations est logique (baisse de 30% à 35% sur les exportations avec la Russie). La balance courante s'est effondrée qui est aussi le signe de la dégradation des conditions sociales. La consommation des ménages a baissé de 40%. S'y ajoutent les effets de l'austérité, l'inflation et la dévaluation.

http://www.mondialisation.ca/le-maidan-financier-en-ukraine-part-1-qui-est-responsable/5435062


En même temps, le rêve d'Europe qui a été propagé en Ukraine a soutenu la volonté d'immigration. Les gens ne s'investissent pas dans un pays d'où tout le monde veut partir. Il y a une démotivation globale de la population, les acteurs économiques fuient, que ce soit à l'Est ou à l'Ouest du pays. En voulant éviter la conscription, les populations jeunes qui sont les plus actives se retrouvent en Pologne, en Roumanie, etc. Du point de vue économique, cette fuite du pays est presque le problème majeur, puisqu'on a beau injecter des capitaux, ils sont confisqués par les oligarques,  qui fonctionnent comme au temps de la féodalité.

Aleksandr Dudak, économiste et politologue ukrainien: "La guerre, l’effondrement sans précédent de l’économie, l’inflation et la dévaluation, tout cela signifie que les Ukrainiens ne sont plus seulement pauvres, mais bien extrêmement pauvres.
«Les pensions mensuelles sont maintenant seulement de $36.50, alors que le salaire minimum est de $47. Gardez à l’esprit que la Banque mondiale définit le seuil de pauvreté à $1,25 par jour soit $37,50 par mois. Et ce n’est pas fini, vu que la hryvnia continue de s’effondrer.»
Aujourd’hui, le salaire moyen en Ukraine est environ le même qu’au Népal ou au Sénégal, selon l’économiste Alexander Okhrimenko. Par conséquent, toute discussion à propos de la possibilité que l’Ukraine serait sur le point de devenir membre de l’UE est un pur fantasme."

L'agriculture ukrainienne est terriblement menacée: profitant de la misère et de la chute de la monnaie, les grandes firmes américaines, en particulier Cargill, DuPont, et Monsanto, multiplient les achats de terres en Ukraine. L'Ukraine possède un quart des "terres noires" (les plus fertiles) de toute l'Europe. Monsanto en particulier pourrait en profiter pour y planter des OGM, et contourner ainsi la législation européenne. Ce n'est pas seulement les Ukrainiens qui sont dépouillés dans l'affaire; c'est toute l'agriculture européenne qui est directement menacée. 

Voir sur ce sujet l'article de Frédéric Mousseau, directeur de recherche à l'institut d'études politiques d’Oklahoma : 

http://www.ipsnews.net/2015/01/opinion-the-corporate-takeover-of-ukrainian-agriculture/


II - la guerre civile

Elle pourrait reprendre de plus belle, et la légère trêve observée depuis les accords de Minsk 2 ne servira probablement aux combattants qu’à se réarmer. L'argent occidental promis par le FMI risque d'être englouti dans l'achat de chars d'assaut et de mortiers, avec lesquels le gouvernement de Kiev s'imagine sans doute pouvoir écraser les insurgés. Porochenko s'est rendu récemment dans les Emirats arabes pour y acheter de nouveaux des armes occidentales (http://french.irib.ir/info/item/361461-l%E2%80%99otan-envoie-des-armes-en-ukraine-par-l%E2%80%99interm%C3%A9diaire-des-emirats-arabes-unis). Or l'attaque lancée précédemment par ses troupes a tourné à la déconfiture, bien qu'elles aient probablement déjà été équipées par les Américains, et soutenues par les mercenaires d'Académy. Les insurgés ont repris l'aéroport de Donetsk, et encerclé 10 000 hommes dans la poche entre Donetsk et Lougansk. Le soutien russe se montre très efficace, y compris contre des armes occidentales. 

Porochenko n'a rien imaginé de mieux que de signer un décret de mobilisation pour envoyer des troupes supplémentaires au front ; cette décision provoque évidemment des vagues de mécontentement, quantité de jeunes refusent de répondre à l'appel, et quittent le pays. Une telle mesure ne peut avoir d'autre conséquence que d'étendre la guerre civile.

http://fr.sputniknews.com/international/20150201/1014244087.html

Or, il y a une solution extrêmement simple pour mettre fin à cette guerre, dont aucun gouvernement ni organe de presse occidentale ne veut parler, c'est que les troupes de Kiev se retirent du Donbass, où elles n'ont rien à faire. Tout le monde fait comme si la présence de l'armée et des bataillons néonazis dans cette région était légitime : qu'aurait-on dit si l'Angleterre avait envoyé ses chars en Écosse à l'époque du référendum sur l'indépendance ?

III - L'attitude des Occidentaux

Ils ne font rien d'autre que jeter sans cesse de l’huile sur le feu ; les Américains trouvent un intérêt évident dans la prolongation de ce conflit qui leur permet de demander sans cesse de nouvelles sanctions contre la Russie. Encouragés par ce discours, les nationalistes sont persuadés que les Américains vont les aider à gagner, et s'entêtent dans un conflit désastreux et sans issue. L'argent américain sert d'ailleurs essentiellement à soutenir l'effort de guerre.

D'autre part, nos gouvernements semblent totalement inconscients de la gravité de la situation ; Obama a l'air de croire qu'il s'agit d'une simple partie de poker menteur avec la Russie, et qu'il est en train de la gagner. Pour les Russes, il ne s'agit pas du tout d'un jeu, mais bien d'une guerre, dans laquelle les occidentaux se lancent de manière absolument inconsciente. Même pour un dirigeant aussi occidentophile que Mikhaël Gorbatchev, ils ont tout simplement perdu la tête. Les dirigeants russes n’arrivent pas à comprendre par quelle folie leurs «partenaires » prennent le risque de s'attaquer ainsi à une pareille puissance militaire. Pour l'instant, ils ne réagissent pas, se contentent de prendre les coups, et espèrent que la raison va triompher d'elle-même. Mais leur patience a des limites, et si les occidentaux persistent, ils répondront à leur manière. Obama comprendra alors, mais beaucoup trop tard, qu'il a réellement agi comme un fou furieux.

http://nationalinterest.org/feature/ukraine-exposed-kievs-authoritarianism-12151

IV - la position de l'extrême droite

Elle s'énerve de plus en plus, et commence à parler franchement de renverser le gouvernement. Elle a perdu des hommes au front, alors que ses membres s'imaginaient pouvoir triompher facilement. Leur rancœur est immense. L'explication qu'ils commencent à donner de leur défaite est particulièrement inquiétante : ils accusent Porochenko de les trahir, et de s'être entendu avec les insurgés pour les écraser. Que cela soit vrai ou non, et qu'ils y croient eux-mêmes ou pas, cela n'a aucune importance en l'occurrence : l'essentiel dans ce discours est qu'il sert à préparer un futur coup d'Etat. Ils ont récemment encerclé le ministère de la défense, en mettant le feu à des pneus ; et ils ne sont partis qu'en assurant qu'ils reviendraient en plus grand nombre.

http://www.1tv.ru/news/world/276780

V - Bilan actuel

Si nous faisons la somme de toutes ces considérations : la faillite économique, la guerre civile qui n'en finit pas, la mobilisation qui révolte la population, les Occidentaux totalement inconscients qui font tout pour attiser le conflit, la Russie qui perd patience, et l'extrême droite qui s'énerve, on voit très mal comment la situation ne tournerait pas à la catastrophe.

Or cette catastrophe va se produire au beau milieu de l'Europe, et les conséquences éventuelles de son développement sont à l'heure actuelle incalculables.


L'actualité de la crise au jour le jour sur : Europe et Russie

Laisser un commentaire

Voir aussi : 

La destruction de l'Europe

L’intervention des USA

Le néofascisme américain

La constitution de la Crimée

L’extrême droite ukrainienne

Crash du Boeing MH 17

La politique des sanctions

La stratégie de manipulation des masses

La guerre civile

Vers une guerre contre la Russie

Les accords de Minsk 2

P. C. Roberts et l'hégémonie américaine

La doctrine de Brzezinski

La doctrine de Wolfowitz